EXCLUSIF UN BUG DANS LES SECOURS A HAÏTI LaTéléLibre a assisté à un dysfonctionnement dans les locaux de…

EXCLUSIF

UN BUG DANS LES SECOURS A HAÏTI

LaTéléLibre a assisté à un dysfonctionnement dans les locaux de la Sécurité Civile à Paris. Lors d’une conférence de routine entre le bureau de Paris et Haïti, une grave pénurie de médicaments a été dénoncée par un responsable des secours à Port -aux-Prince, « on en est réduit à la mendicité auprès des ONG » et même auprès des « témoins de Jehova », a-t-il déclaré devant l’assistance médusée…

5è étage d’un grand bâtiment de la république sur les bords de Seine à Asnières. Nous sommes au centre opérationnel de gestion de crise (cogic) de la Sécurité Civile (ministère de l’intérieur). Dans un décor digne de la série 24 Heures, plusieurs dizaines de personnes gèrent jour et nuit les 500 sauveteurs dépêchés à Haïti après le séisme. Une première pour ce service, jamais autant de personnes n’ont été déployées sur une catastrophe de ce genre. Aux murs, les horloges indiquent les fuseaux horaires du monde entier, et l’heure à Port au Prince. Les grands écrans montrent les cartes satellites sur lesquelles ont distingue les milliers de bâtiments détruits sur l’ile et les zones de déploiement des équipes de pompiers français.

« Grave pénurie de matériel »
Nous sommes venus passer une journée dans ce « nerf de la guerre », observer le travail de ces officiers, commandants, capitaines et colonels. Le début du tournage se déroule normalement, un responsable nous explique les cartes, le déroulement des opérations. Nous avons affaire à des professionnels.
14H, tous les cadres se retrouvent pour l’ audioconférence quotidienne. En ligne, l’un des responsables des équipes de secours sur place à Haïti, qui dirige l’hôpital de campagne. « Aujourd’hui, pénurie grave de matériel » commence ce colonel. L’ambiance est tendue. Implacable, il continue la liste de ce qui manque à ces équipes, annonçant que depuis quelques jours le matériel orthopédique « est à zéro », et que les sauveteurs Français doivent « mendier » du matériel et des médicaments aux ONG sur place et même aux « témoins de Jehova »… Grincements de dents dans la salle de réunion à Asnières. Au cours de la conversation on comprend qu’ il y a un problème sur une commande importante de matériel médical et de médicaments. Cette commande serait ignorée depuis plusieurs jours par le Ministère des Affaires étrangères. Ce dernier est pourtant chargé de gérer le fret pour les équipes de sauvetage sur place. Malaise dans la salle…
Très vite, on nous demande d’arrêter la caméra et de quitter les lieux. On nous demande également de ne pas diffuser ce que l’on vient de filmer, et personne ne voudra s’exprimer sur ce qui s’est dit au cours de cette réunion.
Des questions « indécentes »
Nous nous rendons donc au Ministère des Affaires étrangères, qui aurait ignoré la commande de médicaments, afin de rencontrer le Porte-parole, Bernard Valéro, un pro de la diplomatie française. D’emblée, il nie toute responsabilité, et assure que les équipes de sauvetage font un travail remarquable, que les coordinations entre ministères sont « parfaites »,  et que nos questions sont « un peu indécentes »… L’homme manie la langue de bois avec brio: si les responsables du Cogic n’ont pas voulu répondre à nos questions après la réunion, c’est que le bug n’existe pas… Tout va bien madame la marquise.
Contacté une dernière fois  par téléphone, un responsable de la Sécurité Civile, refusera encore toute explication, mais nous assurera que « tout est rentré dans l’ordre », une semaine après le bug auquel nous n’aurions jamais dû assister.
Alexandra Colineau
Images : Alexandra Colineau et Joseph Haley
Montage : Anthony Santoro et Olivier Joube