Faut-il prohiber la fessée? C’est la question sur laquelle le Conseil de l’Europe compte se pencher dès la rentrée à travers une vaste campagne de sensibilisation intitulée: « Construire une Europe pour et avec les enfants ».

 

La position du Conseil de l’Europe est sans équivoque. Il souhaite interdire toutes les formes de châtiment corporel envers les enfants. Cette organisation internationale, qui comprend 47 pays, s’est fixée pour but de promouvoir la démocratie et les Droits de l’Homme. Située à Strasbourg, elle tente de trouver des solutions aux problèmes de société en Europe.

 

Seulement voilà, la correction physique peut-elle être considérée comme un problème de société? Car si la démarche du Conseil de l’Europe semble pétrie de bonnes intentions, il n’empêche qu’elle soulève un certain nombre d’interrogations. Nous avons contacté par téléphone Elda Moreno. Directrice du programme « Construire une Europe pour et avec les enfants » au Conseil de l’Europe, elle admet qu’il s’agit d' »un sujet sensible et très controversé » mais qu' »il est plus que temps de s’y atteler ».

 

A bien des égards, le fouet, le martinet ou le ceinturon peuvent sembler barbares, mais la fessée, la tape voire la gifle ne sont-elles pas parfois nécessaires? De la même manière, rares sont les enfants traumatisés à vie après une claque sur la main ou le postérieur. Pour autant, le recours à la violence, toute relative soit elle, est-elle indispensable? Le dialogue ne vaut-il pas mieux qu’une rouste? Autant de questions qui nécessitent peut-être de pondérer les différentes mesures et de privilégier le cas par cas à la tolérance zéro. Une tâche à laquelle le Conseil s’est déjà attelé puisqu’il distingue l’usage délibéré et punitif de la force et l’action protectrice de discipline ou d’éducation.

 

A ce jour, seize pays européens* ont introduit dans leur législation l’interdiction explicite de tout châtiment corporel, que ce soit à l’école ou à la maison. C’est la Suède qui, en 1979, en a été la pionnière. Depuis, les parents aux mains lestes peuvent se retrouver devant les tribunaux si leurs rejetons décident de porter plainte. En France, la loi bannit tout châtiment corporel dans les établissements scolaires, mais elle ne prévoit rien concernant les corrections physiques assenées dans le cercle familial. Quant à l’Italie, la Cour Suprême a jugé tous les châtiments corporels hors-la-loi bien que l’arrêt correspondant ne se soit pas encore traduit par une loi spécifique. Se pose aussi le problème des moeurs familiales des minorités – turques, maghrébines et autres- qui peuplent les différents pays européens. Réponse d’Elda Moreno: « Aucune violence ne doit être permise, quelles que soient les origines des individus. »

 

Mais pour l’heure, il n’est pas question d’imposer quoi que ce soit aux pays membres ni « d’envoyer des parents en prison parce qu’ils ont corrigé leur enfant » indique Elda Moreno. En effet, le Conseil de l’Europe ne fait qu’émettre des recommandations et des conseils afin de « persuader chaque pays d’adopter des lois contre les châtiments corporels ». Il souhaite également mettre en place une « campagne publicitaire pour amener le débat » ainsi qu’un système d’aide et de formation pour les parents. Que les pères et mères fouettards se rassurent donc, ce n’est pas aujourd’hui qu’ils en prendront pour leur matricule.

 

* Parmi ces pays: l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, la Bulgarie, la Croatie ou encore Chypre.

 

Aneline Mennella pour LaTéléLibre