À l’occasion de la journée internationale pour le soutien des victimes de la torture, LaTeleLibre revient sur l’«…

À l’occasion de la journée internationale pour le soutien des victimes de la
torture, LaTeleLibre revient sur l’« Affaire Audin ».

Il y a 50 ans disparaissait Maurice Audin. Torturé et assassiné, son corps n’a
jamais été retrouvé. Depuis cette date, son épouse Josette se bat pour établir
la vérité et pour que la France reconnaisse officiellement l’emploi de la torture par son armée pendant la Guerre d’Algérie.

En 1957, Maurice Audin a 25 ans, il est assistant de mathématiques à l’université
d’Alger et membre du parti communiste algérien (PCA) au sein duquel il milite
pour l’indépendance de l’Algérie.
Dans la nuit du 11 juin 1957, les paras du général Massu font irruption au
domicile des Audin. Josette et Maurice sont là, avec leurs trois enfants, leur
dernier a tout juste un mois.
Maurice est embarqué, les officiers français assurent à sa femme qu’elle le
reverra bientôt et ils la séquestrent avec ses enfants transformant son domicile
en souricière. Un guet-apens qui fonctionne. Dés le lendemain, Henri Alleg, membre du
PCA lui aussi et directeur du journal Alger républicain (censuré depuis 1955),
tombe dans le piége.

Les paras l’emmènent dans « le centre de tri » comme le baptisaient les autorités
françaises, une villa en construction à El-Biar dans la banlieue d’Alger. Là, il
y retrouve son ami Maurice « en slip allongé sur une planche, des pinces reliées
par des fils électriques et fixées à l’oreille droite et à l’oreille gauche
».
Maurice a juste eu le temps de lui murmurer : « C’est dur Henri ». Henri Alleg
sera l’un des derniers à voir Maurice vivant.
Le 21 juin 1957, l’armée déclare que Maurice se serait évadé lors d’un
transfert.

Le silence de plomb de l’Etat sera brisé par un tout jeune assistant d’histoire
de l’université de Caen qui deviendra l’un des plus grands historiens français :
Pierre Vidal-Naquet. Dans son ouvrage « L’Affaire Audin » il établit que Maurice
a été assassiné le 21 juin par les mains des officiers para qui l’ont arrêté le
11. La thèse de l’évasion ne tient plus et l’institutionnalisation de la torture
est dénoncée grâce à la publication du livre d’Henry Alleg,  » La Question « ,
témoignage sur son mois de détention à El-Biar.

Josette Audin portera plainte plusieurs fois mais à chaque fois elle se heurtera
aux lois d’amnistie de 1962 et 1968 : « Sont amnistiés de plein droit toutes
infractions commises en relation avec les événements d’Algérie ». Malgré les
enquêtes et les suspicions (le général Aussaresses a évoqué le cas Audin lors de
son procès), la justice française considère toujours que Maurice n’a pas été
assassiné mais qu’il a disparu après s’être évadé.

Le 21 juin 2007, Josette Audin a envoyé une lettre ouverte au Président Sarkozy,
nous l’avons rencontrée le 23, elle venait de recevoir l’accusé de réception de
sa lettre à l’Elysée.

50 ans après, les faits sont à peu près établis.
Il reste à l’Etat français à assumer cette histoire et à reconnaître enfin l’emploi
de la torture par notre armée pendant la guerre d’Algérie.

Jean Seb pour LaTeleLibre

Reportage : Jean-Sébastien Desbordes et Henry Marquis