CORRESPONDANCE Mercredi 3 Septembre 2008, les Mapuches crient leur rage et dénoncent la violence des intrusions policières au…

CORRESPONDANCE

Mercredi 3 Septembre 2008, les Mapuches crient leur rage et dénoncent la violence des intrusions policières au sein de leurs communautés. La dernière en date au sein de la communauté de Temucuicui le 24 Août dernier laissait 6 blessés, des enfants intoxiqués par les gaz lacrymogènes et de nombreuses familles en état de choc.

Les arrestations ces derniers mois de plusieurs journalistes, chiliens et étrangers laissent à penser que le gouvernement actuel du Chili a oublié certains fondements de la démocratie: l’intégrité en droits des minorités et la liberté d’expression.

Elena Varela López, cinéaste documentaliste chilienne, arrêtée le Mercredi 7 Mai 2008 pour divers chefs d’accusation est toujours en détention à ce jour.

Christopher Cyril Harrisson et Joffrey Paul Rossi, journalistes cinéastes français arrêtés le 17 mars 2008 puis expulsés du territoire chilien.

Même sort pour Giuseppe Gabriela et Dario Ioseffi, journalistes italiens, arrêtés le 3 mai 2008.

Ces cinq journalistes ont pour point commun de s’être intéressé d’un peu trop près, selon le point de vue des autorités chiliennes, à l’épineux dossier « Mapuche ».

Au Chili (14 800 000 habitants), les Indiens ont lutté jusqu’au XIXème siècle contre les colonisateurs espagnols. Ils constituent plus de 10 % de la population, mais ont toujours été niés par l’état chilien en tant qu’identité propre pour préserver le mythe de l’homogénéité nationale. 70 % d’entre eux sont en situation de pauvreté extrême. La principale ethnie est celle des Mapuche, au sud du pays.


Mais qui sont les Mapuches?

Le terme « Mapuche » signifie littéralement « Peuple de la Terre » en mapundungun, il désigne les communautés aborigènes de la zone centre-sud du chili et de l’argentine. Ce peuple invaincu des Incas et des Espagnols est depuis toujours fortement réprimé et repoussé sur un territoire de plus en plus restreint. De vastes espaces qui détiennent un potentiel énergétique très important non seulement de part la fertilité de leurs terres, qui a amené les grandes entreprises minières et forestières à y investir sans relâche, mais aussi par l’abondance de cours d’eau de dénivelé important présent dans la cordillère qui a engendré la construction de nombreuses centrales électriques.

Le 3 septembre dernier, les citoyens Mapuches de Santiago, accompagnés du dirigeant de la communauté de Temucuicui Jorge Huechullan, ont remis une lettre à la présidente Michelle Bachelet et au chef de la Police afin de demander la fin de la répression policière au sein de leurs communautés. Ils se sont par la suite réunis dans le centre de la ville au cours d’une marche pacifiste afin de montrer leur soutien aux familles de la communauté de Temucuicui durement réprimées la semaine antérieure lors de l’intrusion des forces de l’ordre. En effet, à 6h du matin le dimanche 24 Août, 300 policiers emmenés par 10 bus et 5 fourgons accompagnés de 7 véhicules lanceurs de gaz et 1 mini tank se sont introduits non sans violence dans les foyers afin de débusquer l’un des auteurs présumés de l’incendie du 17 août affectant une grande entreprise forestière.
À l’intérieur des prisons de Angol, Victoria, Lebu, Concepción, Temuco y Traiguén se trouvent plus de 20 prisonniers Politiques Mapuches la plupart jugés sous la législation antiterroriste votée en 1984 du temps du dictateur Pinochet. Cette loi stipule que toute action dirigée contre le gouvernement représente un acte de terrorisme et doit être punie en conséquence.
Les Mapuches revendiquent aujourd’hui encore la gouvernance de leur territoire, la libération des prisonniers politiques et demandent la ratification de la convention Nº169 relative aux droits des peuples indigènes.
A plusieurs reprises, le gouvernement a reçu des appels provenant de la Commission des Nations Unis Contre la Torture, du Groupe International de Travail sur les Affaires Autochtones (IGWIA), du Forum Permanent sur les Questions Autochtones de l’ONU, de la Fédération Internationale des Droits Humains en Amérique Latine, ainsi que de la part d’Amnesty International.
Le Chili est entré le 21 Mai dernier au comité des droits de l’homme de l’ONU, pourtant le gouvernement de la Présidente Bachelet fait la sourde oreille aux avertissements des organismes internationaux et aux campagnes menée par les organisations Mapuche au Chili, en Europe et dans d’autres régions du globe.
La devise nationale du Chili sera-t-elle modifiée un jour : « Por la razon o la Fuerza » (« Par la raison ou par la Force »).
A partir de quand ce gouvernement de gauche, tendance néo-libérale, cessera-t-il la répression contre ses peuples originaires?
La communauté internationale sera-t-elle capable d’obliger l’état chilien à écouter les revendications du peuple Mapuche?
LaTéléLibre donne la parole à ce peuple, qui peine à se faire entendre.

Thomas Aboudharam & Aurélien Merceron
Correspondants pour LaTeleLibre au Chili

Voir le site des Mapuches (en français)