Ces jours-ci, chacune de ses sorties, chacune de ses interventions donne lieu à une nouvelle maladresse. De plus en plus malmenée par la gauche mais aussi par son camp, la Garde des sceaux, Rachida Dati, perd chaque jour un peu plus de crédibilité. Mardi 3 juin, elle a surtout « perdu son sang-froid » en accusant le parti socialiste d’avoir loupé sa politique d’intégration et, de fait, d’être responsable de l’affaire du mariage annulé.

Ce mercredi le chef de l’Etat apporte un soutien sans concession à sa Garde des Sceaux, victime selon lui d’un « lynchage médiatique ».

VIDEO - Intervention de Dati à l'Assemblée, mardi 3 juin

Il y a des interventions qu’on aimerait ne jamais avoir faites. Il y a des moments, aussi, où on devrait éviter de l’ouvrir et faire profil bas. La ministre de la Justice l’apprend, en ce moment-même, à ses dépens.

Depuis quelques semaines, Rachida Dati accumule les sorties de route. En début de semaine dernière, c’était le président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer qui, après le vote d’un amendement inscrivant la parité professionnelle dans la Constitution – contre l’avis de la Garde des sceaux -, lui demandait de se calmer et de laisser se poursuivre les débats.

La surenchère des bourdes

Quelques jours plus tard, autre bévue. Celle-ci bien plus retentissante : le mariage annulé pour non-virginité de l’épouse. Une décision que Rachida Dati soutient… avant de demander au parquet de faire appel… et avant de redire qu’elle comprend l’annulation. Je suis pour, mais un peu contre quand même. De quoi laisser perplexe quant à la faculté d’analyse et de prise de position de la Garde des sceaux.

Et le clou de ce spectacle s’est sans doute joué ce mardi 3 juin, dans les rangs de l’hémicycle. Défendant sa position sur ladite annulation du mariage lillois devant les députés, la ministre de la Justice a littéralement perdu son sang-froid et laissé parler ses émotions. La femme sensible, et semble-t-il affaiblie, remplaçant le temps d’un discours exalté la ministre habile et diplomate.

Tout est la faute de la gauche

Discours exalté ? Oui, sans aucun doute. Nul ne sait si Rachida Dati avait préparé ce discours. Avait préparé cette vindicte, cette charge contre l’opposition socialiste. Mais tout semblait sortir du plus profond d’elle-même. Qu’est-ce qu’elle a dit ? Que la politique d’intégration du PS a été un échec et qu’au final si l’on est arrivé là – une annulation de mariage pour cause de non-virginité -, tout était la faute des socialistes qui ont « abandonné ces jeunes filles » de banlieue. Des jeunes filles comme elle a pu être… De la « victimisation féministe », dira la députée socialiste Elisabeth Guigou. Et surtout, pourrait-on dire, du Fadela Amara, version UMP et le tailleur en plus.

Ce coup de sang intervient donc après des semaines de bourdes de la part de la Garde des sceaux. Adoubée par le président de la République, elle est désormais critiquée au sein de son propre clan. Non, Rachida Dati ne fait plus l’unanimité. Les personnalités qui continuent de la défendre se comptent sur les doigts d’une main : Xavier Bertrand semble être l’un des seuls à la comprendre. Les autres ne « l’enfoncent » pas, mais ne la soutiennent plus non plus. Pour preuve : lors du vote sur les institutions ce même mardi 3 juin, le Premier ministre n’a pas remerciée sa ministre de la Justice d’avoir défendu le texte. Fini l’état de grâce, bonjour la disgrâce pour Dati. En attendant la suite : une prochaine bourde, une éviction du gouvernement ou une ministre tenue un temps au silence.

Aurélie Piel