Alors que toute la presse évoquait le show des vœux du Président Sarkozy, la machine législative accouchait dans…

Alors que toute la presse évoquait le show des vœux du Président Sarkozy, la machine législative accouchait dans la nuit d’une inquiétante mutation du droit pénal qui, pour la première fois, condamne les personnes potentiellement dangereuses.

Un crime sur le futur en somme. Comme dans le film « Minority Report », on vous fout en taule avant que, même malgré vous, vous ne commettiez un acte délictueux… LaTéléLibre a passé cette longue soirée à l’Assemblée Nationale, là où on fabrique et vote les lois.

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C’était une promesse de Nicolas Sarkozy.

Un dispositif imaginé après l’affaire Enis, en août 2007 du nom du petit Enis, enlevé et violé à Roubaix par Francis Evrard, pédophile récidiviste.
Rendu plus urgent encore par la mort d’une jeune femme tuée par un violeur dans le RER en novembre…
Ce mardi 8 janvier, le projet de loi Dati « sur la rétention de sûreté » créant des ‘centres fermés’ socio-médico-judiciaires spécialisés, dans lesquels des criminels « dangereux » pourront être enfermés pour une durée indéterminée à leur sortie de prison, provoque un débat houleux dans un hémicycle assez désert.

C’est une commission pluridisciplinaire (magistrat, psychologue, psychiatre, etc…) qui décidera de la dangerosité de l’individu. La décision sera prise pour un an renouvelable sans limite par une commission composée de trois magistrats de la cour d’appel.

Mutation du Droit Pénal

Au cours du débat sont soulevées de nombreuses questions juridiques, constitutionnelles et mêmes éthiques et philosophiques. L’opposition parle de monstruosité juridique, et s’inquiète de la mutation inédite du droit pénal français engendré, selon elle, par un texte guidé par le « marketing politique ». Elizabeth Guigou en dénonçant les fondements idéologiques qu’elle croit déceler sous ce texte va même jusqu’à parler d’Allemagne nazie*…
Le dispositif était prévu au départ pour les crimes sur des mineurs de moins de 15 ans. Mais les amendements des députés de la majorité permettent peu à peu au texte de s’étendre aux mineurs de 15 à 18 ans, comme à tous les auteurs de crimes aggravés condamnés à quinze ans d’emprisonnement ou plus. Un amendement rend possible l’enfermement de criminels récidivistes condamnés avant la promulgation de la loi….

Le texte de loi a été adopté dans la nuit de mercredi à jeudi 9 décembre 2008.

Karine Yaniv, Joseph Haley, Anthony Santoro

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* Extrait de l’intervention d’Elizabeth Guigou en discussion générale : « Votre texte autorise toutes les dérives, toutes les escalades, toutes les fuites en avant, comme le montrent les amendements du rapporteur qui va jusqu’à enfreindre le principe de rétroactivité de la loi pénale. Vous, Madame la Ministre, vous Monsieur le rapporteur, anciens magistrats vous tournez le dos à Beccaria nourri de la philosophie des lumières, vous choisissez Lombroso et son « homme criminel ». Or vous le savez c’est cette philosophie positiviste qui a conduit aux pires débordements de l’Allemagne nazie. Je vous demande … »
Dans un communiqué transmis depuis à l’AFP, Jean-François Copé a « condamné ces propos indignes qui ont profondément choqué les élus de la majorité ».

Robert Badinter réagi à la loi dans le journal de Pujadas.