[HOMMAGE] Sous le choc suite à l’attentat contre Charlie Hebdo, LaTéléLibre diffuse cet extrait inédit d’une interview de Cabu, réalisée dans les locaux de Charlie par nos équipes en novembre dernier. Nous avons peu de mots. Nous sommes Charlie.

Rassemblement à partir de 17h30 à République

 
Nous sommes Charlie. 
 
Nous serons debout et visibles pour rendre hommage à nos confrères. Nos amis.

 

Pourquoi cette soudaine envie de chialer ?

Parfois, quand les mots nous manquent, autant utiliser ceux que les autres alignent avec justesse. Ainsi, ceux de Daniel Schneidermann
Et soudain, le nom de Cabu. Soudain, au milieu des infos encore incertaines, des bilans contradictoires, de l’affolement des chaînes d’info et de Twitter, soudain le nom de Cabu, parmi les victimes.
Cabu ? Cabu. Pas Cabu, tout de même ? Si. Cabu. Et pas seulement. Et aussi son vieux copain Wolinski. Et aussi deux plus jeunes, Charb et Tignous. Et huit autres, dont nous ne savons pas encore les noms, mais que nous attendons de connaître.
Mais Cabu, d’abord. Pourquoi Cabu plus que les autres ? Pas pour les séparer dans la mort, bien sûr. Mais parce que Cabu, comment dire ? On a tous grandi avec Cabu. On a tous, au-delà d’un certain âge […], grandi avec le grand Duduche et son beauf. On a tous rêvé, comme Duduche, d’embrasser dans la cour la fille du proviseur. C’était l’époque où Cabu ne dessinait encore sur rien d’autre que sur les émois, et les révoltes, lycéens. C’était avant. On a tous grandi avec ce lunaire au cœur tendre, que l’on vient d’assassiner aujourd’hui.
Cabu, Charb,Tignous, Wolinski : qui aurait pu prédire que ces quatre noms, associés dans la mort, nous feraient un jour pleurer, seulement pleurer ?
Cabu, Charb, Tignous, Wolinski : chacun ses symboles. Chacun ses écroulements intérieurs. Comment, au milieu de la réprobation mondiale, que tympannisent les chaînes d’info, comment exprimer ce sentiment, de vivre un 11 Septembre intime ?
Comment dire aussi cette certitude qu’il y aura un avant et un après ? Comment dire qu’une ligne est tracée, qui ne s’effacera pas ? […] Quels que soient ses auteurs, que l’on ne connait pas encore, une ligne vient d’être tracée. Quiconque ne partagera pas sans réserve l’horreur du carnage de ce matin sera tout simplement, désormais, un ennemi.
Tout y est dit ! Simplement. Loin des éditoriaux à venir et des débordements à craindre. Parfois, on a du mal à se séparer de l’affect, de prendre le recul nécessaire à l analyse. Et c’est juste dur…