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Après trois semaines de manifestations en Tunisie, la diplomatie française haussait enfin le ton contre le régime du président Ben Ali. François Fillon, en déplacement à Londres jeudi dernier, condamnait pour la première fois la répression des manifestations par les forces de sécurité tunisienne. Un montage sonore réalisé par le journaliste Arnaud Pontus et diffusé sur les ondes de RFI le 13 janvier dernier dénonce cette réaction tardive de la « France des droits de l’homme ».

Le 13 janvier dernier, Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), faisait état d’un triste constat : 66 personnes auraient été tuées depuis le début de la grogne sociale en Tunisie. La brutalité des forces de sécurité – n’hésitant pas à répondre aux manifestants par des tirs à balle réelle – explique ce bilan. Coïncidence ou pas, la France condamnait le jour même pour la première fois, par l’intermédiaire de son premier ministre François Fillon, les débordements commis : « On ne peut continuer dans cette utilisation disproportionnée de la violence ». Les troubles en Tunisie ont pourtant commencé le 17 décembre dernier : une tentative d’immolation d’un jeune homme d’une vingtaine d’années, en plein jour devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid (centre-ouest du pays), a immédiatement provoqué un mouvement de révolte dans la ville. Parmi les faits reprochés au régime de Ben Ali – au pouvoir depuis 1987 – un taux de chômage très élevé, une précarité socio économique importante et une liberté d’expression bâillonnée. Le tout combiné à une hausse du coût de la vie.

Un montage sonore de RFI pointe le silence de la diplomatie française
Avant la réaction de François Fillon, la diplomatie française s’était montrée indulgente vis-à-vis du président tunisien. Une politique de l’autruche mise en exergue par un montage sonore diffusé sur RFI le 13 janvier lors de la chronique de 7h13.

Le document reprend les réactions très prudentes de certains ministres français depuis le début du conflit. Après un rapide retour en 2007 sur un discours d’un Nicolas Sarkozy alors en campagne pour la présidentielle : «Je veux être le président de la France des droits de l’homme … Le silence est complice, je ne veux être complice d’aucune dictature à travers le monde », la voix off constate – ironiquement – la fermeté actuelle de la voix française sur le conflit social en Tunisie. Du « Je me garderais bien de donner des leçons d’une manière trop univoque » de Fréderic Mitterrand le 9 janvier dernier (ministre de la culture) au « Le président Ben Ali est quelqu’un qui est souvent mal jugé » de Bruno Le Maire (ministre de l’agriculture) deux jours plus tard, la diplomatie française en prend pour son grade. Son silence fait désordre dans « la France des droits de l’homme ».

Jonathan Bordessoule