JUSTICE?

Au moment de publier cette article, nous apprenons que le Procureur général vient de refuser de faire appel du verdict. Aucun pourvoi n’est donc possible.

En désespoir de cause, la mère de Joseph, Micheline Guerdner entame une grève de la faim. Elle a décidé de s’installer devant le bureau du Procureur, afin qu’il revienne sur sa décision.

Matthieu Martin, un des piliers de LaTéléLibre était à Draguignan la semaine dernière pour le procès du gendarme qui avait tué un gitan, Joseph Guerdner.

Vendredi 17 septembre, le gendarme a été acquitté par le Tribunal. Matthieu qui est resté deux jours raconte la fin de ce procès, où tout semblait écrit à l’avance.

CE QUI ME DÉRANGE  !

Un gendarme a-t-il le droit de tuer ? Oui, dit le Code de la Défense derrière lequel le gendarme Monchal s’est réfugié durant tout le procès. Il a le droit de faire usage de son arme après avoir eu recours à toutes  les  sommations possibles. Le gendarme accusé les a-t-il respectées ? Sa  « funeste » décision de se saisir de son arme et de tirer sur le fuyard était elle inévitable ?
Pas sûr selon l’ex procureur de Draguignan, Maitre Girard,  qui, avant d’être muté, s’occupait de cette affaire et avait ouvert une information judiciaire contre le gendarme pour homicide volontaire. Selon lui, le représentant de la loi était responsable d’une accumulation de négligences qui avait entrainée la tentative d’évasion de Joseph Guerdner.

Durant le procès, les avocats de la partie civile Maitres Ciccolini et Giudicelli, comme Don Quichotte, se battaient contre des moulins à vents. Ils ont eu beau prouver la culpabilité de l’homme, pour autant la culpabilité du gendarme n’a pas été retenue. Le contenu des débats tournait principalement autour du passé délinquant de la victime. Comme la défense, le ministère public s’est attaché à défendre la cause du représentant de l’ordre.  Il a requis l’irresponsabilité pénale du gendarme, ce qui signifie que l’officier aurait agit dans le cadre de sa mission. On n’était plus au procès de l’adjudant Monchal mais à celui de Joseph Guerdner, « le Gitan » !

Au rendu du verdict, bien sûr, il y a eu des cris et des larmes ! Une mère n’a-t-elle pas le droit de se sentir flouée par une justice qui dit que « le meurtrier » de son fils a agit conformément à ses prérogatives ? N’est-il pas normal que des personnes se sentant persécutées et si peu considérées aient envie de crier à l’injustice ? La famille Guerdner espérait qu’enfin, on reconnaisse que leur fils, leur frère, n’aurait pas dû mourir dans ces circonstances. L’homme, protégé par son uniforme, ne peut donc pas être jugé comme ses concitoyens et par ce jugement d’acquittement, Joseph Guerdner est mort une seconde fois.

Après ce procès, plusieurs questions restent en suspend. Une cour d’assise est elle le bon lieu pour juger un représentant de la loi ? Car quand la défense et le procureur « jouent » ensemble, les dés de la partie civile risquent d’être pipés. A l’évidence, quand les conclusions de l’avocat de la défense se rapprochent du réquisitoire du procureur, il est inévitable que les jurés soient influencés dans leur décision. De plus, à l’annonce d’un acquittement, la partie civile ne peut pas faire appel de la décision. Le dernier recours est le pourvoi en cassation mais la procédure prendra encore du temps.

Enfin, comme le reconnaît l’avocat général, Maitre Guémas, ce jugement montre la nécessité de revoir le cadre de l’usage des armes par les gendarmes, exerçant sur le sol français. Ce cadre devrait s’aligner sur celui de la police nationale où l’usage d’armes à feu n’est possible QUE dans le cadre de la légitime défense.

Texte et photos: Matthieu Martin

palais de justice Draguignan