NON-VIOLENCE PROCLAMÉE

Le premier français à être rentré en France « pour témoigner » assure que les consignes de non-violence des organisateurs du convoi humanitaire ont été précises

Dans la nuit de dimanche à lundi, une flottille transportant des militants pro-palestiniens a été prise d’assaut par un commando de la marine israélienne alors que les navires se dirigeaient vers la bande de Gaza. L’assaut a été violent, il a surpris les militants qui pour la plupart se sont montrés pacifistes respectant les consignes des organisateurs de la mission humanitaire. La flottille allait ravitailler la bande de Gaza qui subit un blocus quasi-total depuis juin 2007. L’assaut a été donné dans les eaux maritimes internationales, un territoire dédié «  à des fins pacifistes » comme le stipule l’article 88 de la convention de l’Onu sur les droits de la mer.

Le bilan en perte humaine est lourd: neuf passagers ont été tués et selon l’armée israélienne, sept soldats ont été blessés, dont six hospitalisés. La communauté internationale a montré dès lundi son indignation contre ce fait d’arme qui montre l’hostilité d’Israël envers les Palestiniens. Mardi, le Conseil de sécurité de l’ONU a siégé pour décider des suites à donner à cet acte violent. A l’issue de la réunion, le conseil de sécurité a demandé « le lancement sans retard d’une enquête impartiale, crédible et transparente conforme aux critères internationaux ». Le Conseil des droits de l’homme de l’Onu a tenu un débat urgent sur le raid israélien mardi 1er juin. Il a approuvé la mise en place d’une « mission d’enquête », décision que n’a pas entériné les Etats-Unis. Presque tous les Etats ont demandé une enquête et la levée du blocus du territoire palestinien.

Youssef Ben Derbal, membre du comité de bienfaisance et de secours au peuple palestinien a été le premier Français à être libéré. Lundi, lorsque les passagers sont arrivés sous escorte des commandos au port israélien d’Ashdot, ils pouvaient être expulsés immédiatement. Les six autres Français ont refusé leur expulsion. Youssef Ben Derbal, lui, a fait le choix de rentrer en France « pour témoigner ». Il est arrivé mardi matin à Roissy-Charles-de-Gaulle, les mains vides, sans avoir pu ramener aucun de ses bagages.

A son arrivée à l’aéroport, Youssef Ben Derbal, témoigne devant la presse: « dès le départ, les instructions ont été bien précises, aucune provocation de la part des pacifistes. […] sur le bateau sur lequel j’étais on a été calmes, […], il n’y a pas eu de gestes déplacés ».

« We are pacifist, not terrorist »

Dans un interview donné à Europe 1, mardi 1er juin 2010, Youssef Ben Derbal assure qu’aucun des passagers présents sur son bateau n’était armé. « Sur notre bateau, les consignes étaient claires : ne pas provoquer, rester calme, leur dire : « We are pacifist, not terrorist ». Amer, Youssef Ben Derbal termine l’interview en disant: « si apporter de l’aide, être dans les eaux territoriales internationales, se traduit par une provocation, je me demande dans quel monde on vit ».

Aujourd’hui, un porte-parole de l’administration pénitentiaire israélienne a déclaré « plus un seul des détenus n’est actuellement en prison ». Les militants ont été tous libérés. A priori, le groupe de Français devrait reprendre un avion d’ici jeudi matin au plus tard. A la différence de Youssef Ben Derba qui se voyait « plus utile en France qu’entre les mains des Israéliens », les militants ont refusé de signer une « demande de sortie immédiate », un document ouvrant droit à leur expulsion. Désormais, les militants sont disposés à faire cette démarche et le Quai d’Orsay assure (selon lepoint.fr), que leur expulsion n’est plus qu’une « question de logistique ». Au Ministère des affaires étrangères, on s’occupait cet après-midi de trouver un vol de retour pour les ressortissants français encore en Israël.

Un porte-parole de la la Campagne civile internationale pour la protection du peuple palestinien (CCIPPP) a déclaré que « les Français [présents sur les navires de l’organisation Free Gaza] sont des coordinateurs de la CCIPPP ou des membres d’associations pro-Palestiniennes ».

La France affirme sa position

François Fillon avait exigé mardi 1er juin 2010 à l’Assemblée nationale la « libération immédiate » des sept Français et de l’ensemble des civils, qui se trouvaient à bord des bateaux arraisonnés dans la nuit du 31 mai par un commando israélien. Prenant une position plus engagée par rapport à celle émise le jour de l’assaut, le Premier ministre français a déclaré devant les députés: « la France exige avec l’Union européenne et avec l’Organisation des Nations unies l’ouverture immédiate d’une enquête internationale, indépendante et impartiale parce qu’il faut faire la lumière sur ce qui s’est produit hier ». Et d’ajouter: « C’est un acte qui n’est pas justifié, c’est un acte qui est contraire au droit international et c’est surtout un acte qui fait reculer l’espoir si ténu de la reprise à laquelle nous travaillons d’un dialogue direct entre les Israéliens et les Palestiniens ». Le gouvernement a donc compris que sa réaction diplomatique émise le jour-même de l’assaut n’était pas à la hauteur des faits dramatiques qui se sont produits.

Drapeau blanc

Une vidéo d’Al Jazeera remet en contexte l’attaque et apporte une information qu’on n’avait pas lundi: des militants pro-palestiniens ont fait preuve de leur volonté de non-violence envers les troupes du commando marine israélien.

Dans cette vidéo, le correspondant d’Al Jazeera fait un plateau (à 0’55 ») dans lequel il dit que les militants ont brandi un drapeau blanc. A 1’44 », on voit des images de la conférence de presse donnée par Danny Ayalon, le Vice-ministre des Affaires étrangères d’Israël, dans laquelle il parle du lien des militants pro-palestiniens avec Al-Qaeda et le Hamas. Au cours de cette déclaration (qu’on ne trouve pas dans cette vidéo), il a également affirmé: « sur le bateau, nous avons trouvé des armes préparées à l’avance qui ont été utilisées contre nos forces ». Au TC 2’30 », Greta Berlin du mouvement Free Gaza rappelle que les navires étaient dans les eaux internationales et qu’on n’a pas le droit d’attaquer un navire dans cette zone maritime.

Pauline Gannot