Le cannabis est déclaré « nouveau danger n°1 » sur les routes. Il vaut donc mieux éviter de conduire après avoir fumé, même si les nouveaux test salivaires ne sont pas encore au point.

Dans un entretien au Figaro début juillet, Michèle Alliot-Marie, le ministre de l’Intérieur, a annoncé la distribution de 52 000 tests salivaires aux gendarmes et policiers. Ces tests vont permettre aux forces de l’ordre de détecter la consommation de stupéfiants chez les automobilistes. Leur cible est notamment le cannabis, l’une des drogues les plus répandues chez les usagers de la route contrôlés jusqu’ alors grâce à des tests urinaires. Plusieurs associations et médecins remettent en cause la fiabilité de des tests salivaires. La Télé Libre a donc assisté à un contrôle routier. Nous avons également rencontré un expert en toxicologie et un militant pour la dépénalisation du cannabis.

« Vos papiers s’il vous plaît ? Contrôle de police ! » En plein centre-ville de Clichy-la-Garenne cette nuit-là, les automobilistes ont été surpris par une armada de policiers. Les forces de l’ordre des Hauts-de-Seine ont organisé une opération d’envergure dans la nuit du 26 au 27 septembre. Le préfet, le procureur de la République de Nanterre, et le directeur de la direction départementale de la sécurité publique avaient fait le déplacement pour l’inauguration du test salivaire dans le 92.

Prévention et … répression

Des dizaines d’automobilistes ont été contrôlés avec plus ou moins de bonne volonté. 142 tests d’alcoolémie et deux tests salivaires plus tard, quatre automobilistes ont été positifs à l’alcool et aucun n’était positif à la consommation de drogues. « Les usagers deviennent raisonnables », se réjouit un policier sur place. Le délit de conduite d’un véhicule après usage de stupéfiants, créé en 2003, prévoit deux ans d’emprisonnement, 4 500 euros d’amende et un retrait de 6 points du permis.

Une lourde peine et un test peu fiable

Malgré la satisfaction des autorités, un doute subsiste néanmoins sur la fiabilité de ces tests. En effet, les scientifiques des laboratoires de médecine légale réclament un test dont la sensibilité soit équivalente à celles des tests urinaires. Très efficaces pour la détection de la cocaïne, des opiacées (morphine, héroïne), et les amphétamines, les tests salivaires laisseraient en revanche passer à travers les mailles du filet nombre de consommateurs de cannabis. La salive ne conserverait pas de traces de cannabis très longtemps. Selon un expert en toxicologie de l’Institut Pasteur, Jean-Claude Alvarez, que nous avons rencontré, sa fiabilité ne serait que de « 50 à 60%».

Mais à partir de quel seuil est-on dangereux, après avoir fumé ?

Autre sujet de débat : la loi ne prévoit aucun seuil en-dessous duquel l’automobiliste est jugé apte à conduire. Et pour cause, il est interdit de détenir ou de consommer du cannabis, considéré comme une drogue douce par certaines associations. C’est le cas du collectif pour l’information et la recherche cannabique (CIRC), qui milite pour sa dépénalisation. « C’est un problème délicat parce que conduire en état d’ivresse cannabique peut être dangereux. Nous ne contestons pas le fait que la police s’intéresse à tout ça. Ce que nous contestons c’est la fiabilité des tests, explique Jean-Pierre Galland, président du CIRC-Paris. Beaucoup de gens qui ont fumé la veille ou l’avant-veille sont encore contrôlés positifs au test sanguin [chaque test urinaire ou salivaire positif est confirmé par une analyse sanguine, NDLR] avec des taux très faibles. Il y a eu une étude dont on parle très peu d’ailleurs, faites par 11 scientifiques en Europe qui ont fixé un taux qui pour eux serait entre 7 et 9 nanogrammes par millilitre de sang qui correspondrait au 0,5g/l de sang pour l’alcool. Ce qu’il faudrait tout simplement c’est que le gouvernement tienne compte des études. Son but, c’est de contrôler les fumeurs de cannabis », s’insurge-t-il.

L’objectif officiel reste la baisse du nombre de morts sur les routes. Selon l’enquête la plus récente réalisée en 2005, 230 personnes sont décédées dans des accidents liés à la consommation de stupéfiants. Les 15-24 ans, soit 13% de la population, totalisent 27% des tués sur la route.

Kelly Pujar
Matthieu Martin
Joseph Haley
Lucile Latour