Les jours de grève, une vraie galère pour les familles ? Plus pour longtemps grâce… au service minimum d’accueil dans les écoles. Un service minimum qui doit entrer en vigueur en septembre 2008, et qui sera, de nouveau, expérimenté lors de la journée de grève et de manifestation du jeudi 15 mai. Xavier Darcos revient à la charge.

Xavier Darcos veut relancer le service minimum d’accueil (SMA) dans les écoles, déjà testé (et peu suivi) lors de la grève de la fonction publique du 24 janvier. Une première expérimentation en demi-teinte, qui n’empêche pas le ministre de l’Education de revenir à la charge à l’occasion de la grève des enseignants prévue le 15 mai. Car rappelons-le, le service minimum, c’était une des promesses clef de la campagne présidentielle de N. Sarkozy…

Avec le SMA, il s’agit en fait de « venir en aide aux Français, sans remettre en cause les mouvements de protestation », rappelait François Fillon, lundi, sur France Info.

Le 24 janvier, seules 2023 communes, 1000 selon le Parti socialiste, sur 22 500 possédant une école s’étaient portées volontaires. Des communes qui s’engagent à prendre en charge la garde des enfants, pendant les six heures d’enseignement, en cas de grève des enseignants.

Pour cela, elles signent une convention avec l’État qui verse la somme de 90 euros par tranche de 15 élèves accueillis. Ce financement est assuré à partir des fonds correspondant aux retenues sur salaire des enseignants grévistes. Les enfants peuvent être reçus dans les écoles, dans des structures municipales ou associatives. Le flou règne quant au personnel encadrant, Xavier Darcos a évoqué les employés municipaux, les animateurs ou les enseignants non-grévistes.

Un service difficile à mettre en place

Certaines communes n’ont cependant pas attendu le service minimum dans les écoles pour mettre en place une garderie. A Issy-les-Moulineaux, fief d’André Santini, la « garderie professionnelle » existe depuis 13 ans pour dépanner les parents en cas de grève. La commune compte 28 écoles publiques. Les enfants sont encadrés non pas par des employés municipaux mais par des animateurs vacataires. « Le 24 janvier, 754 enfants ont été accueillis sur les 5667 que compte la commune. L’Etat nous a versé 4500 euros, ce qui couvre 30 à 40 % de la dépense », explique Anne-Sophie Salomon, directrice adjointe du service éducation à la mairie d’Issy-les-Moulineaux. Cette somme ne couvre donc que partiellement les frais. Elle souligne par ailleurs « la difficulté de prévoir le nombre d’enfants qui vont être accueillis ». Une difficulté accrue dans les grandes villes. « A Lyon, il y a plus de 200 écoles, ce n’est pas la même organisation, c’est quasiment impossible à mettre en œuvre », explique Yves Fournel, adjoint à l’éducation et à la petite enfance à la mairie de Lyon. A Paris, même son de cloche, cela requiert une organisation rigoureuse , car la capitale compte 659 écoles. « Comme en janvier dernier, je regrette que l’improvisation soit largement érigée en système, comme l’illustre en particulier l’absence de dialogue, tant avec les communes qu’avec les personnels concernés », fait remarquer Bertrand Delanoë dans un communiqué daté du 5 mai.

Une volonté gouvernementale critiquée

Les syndicats se dressent contre le flou qui entoure la mesure. Pour Gilles Moindrot, secrétaire général du Snuipp, syndicat majoritaire du primaire, « Xavier Darcos n’a pas fait le bilan de la journée du 24 janvier, alors que nous l’avions sollicité ». Le ministère a cependant indiqué qu’un bilan serait effectué après le 15 mai.

En attendant, Xavier Darcos rappelle, ce mardi 13 mai, soit deux jours avant la grève, qu’il envisage de recourir à la loi si les enseignants ne se déclarent pas grévistes 48 heures avant le mouvement. « C’est nécessaire que nous sachions quand et où les professeurs seront en grève. J’espère que je n’arriverai pas à la loi, que je ne serai pas obligé, mais s’il le faut je le ferais », a-t-il insisté, assurant qu’« à la fin du quinquennat le service minimum d’accueil (SMA) se sera imposé ».

Du côté des municipalités, les arguments à charge ne manquent pas non plus. Et notamment celui concernant le transfert de responsabilité de l’Etat vers les communes. « On ne peut pas régler à la place de l’Etat, ses conflits avec ses salariés », souligne Yves Fournel. L’Association des maires de France (AMF), pourtant présidée par le maire UMP de Lons-le-Saunier, Jacques Pélissard, critique aussi le service minimum d’accueil : « C’est à l’Éducation nationale d’organiser le service minimum, les maires ont de grosses inquiétudes en cas d’incidents et de responsabilités ». D’autant que la mesure ne définit pas si la commune devient juridiquement responsable ou pas.

Vers un nouveau tollé ?

Tandis que Xavier Darcos semble déterminé à aller au bout de sa mesure, faisant fi des contradictions, l’UMP tente de mobiliser ses troupes et stigmatise ceux qui ne le font pas à l’instar de Frédéric Lefebvre, porte-parole de l’UMP qui sommait Bertrand Delanoë « d’assumer ce pour quoi il a été élu, rendre service aux Parisiens, et non pour des raisons idéologiques refuser tout service minimum ». Pourtant on le sait déjà, à Paris, Toulouse, Montpellier, Strasbourg, Nantes, le service minimum ne sera pas organisé. La mairie de Bordeaux ne s’engagera qu’à partir de septembre.

François Fillon a mis un peu plus le feu aux poudres en politisant encore le débat et en déclarant lundi, « les mairies qui ne veulent pas le faire ne le feront pas, les Français jugeront quelles sont les collectivités locales qui cherchent à se décarcasser pour venir en aide aux Français ». On l’aura compris, le gouvernement ne se prive pas de faire passer les familles pour des victimes prises en otage par les enseignants grévistes, voire par la gauche dans son ensemble, qu’il veut placer du côté de l’immobilisme, du passéisme et du blocage.

le service minimum, une bonne chose pour 60% des Français
En attendant, et alors que se profile la perspective d’une grève massive jeudi, ce mardi 13 mai, un sondage CSA/i-Télé/Le Parisien-Aujourd’hui en France annonce que « soixante pour cent des Français estiment que la volonté du ministre de l’Education, Xavier Darcos, d’étendre le service minimum dans les écoles pour la grève des enseignants le 15 mai est « une bonne chose, car cela permet de ne pas pénaliser les parents qui travaillent » ».

Nathalie MAZIER