Après son échec aux municipales, et les récentes défections au sein du MoDem, François Bayrou se retrouve ces…

Après son échec aux municipales, et les récentes défections au sein du MoDem, François Bayrou se retrouve ces dernières semaines de plus en plus isolé. La publication, dans le Monde du 10 avril, du contenu d’une note interne de l’Élysée rendant compte au chef de l’Etat de l’affaiblissement du MoDem, a été abondamment commentée comme étant la preuve que Nicolas Sarkozy veut la peau du leader centriste. A la sortie d’une conférence de presse dans laquelle il a annoncé lundi 14 avril une « clarification » prochaine de la ligne du MoDem par un vote des militants, et affirmé être « personnellement engagé » dans la contre-attaque, un François Bayrou sur la corde raide répondait aux questions de La Télé Libre.

« On ne gouverne pas un parti comme une secte »

Quand il convoque la presse, lundi 14 avril, François Bayrou est plus seul que jamais. Les premiers lâchages centristes de l’après présidentielle, et la création du Nouveau Centre, n’ont été que les premiers d’une longue série de défections des anciens proches du béarnais. Au Mouvement Démocrate, on explique ces départs en accusant les amis d’hier « d’aller à la soupe ». Eux se défendent, et mettent en cause la « gestion autocratique » du parti par François Bayrou. Parmi les derniers à avoir annoncé son départ, Jean Arthuis, sénateur de la Mayenne, a récemment comparé le MoDem au Temple Solaire et taclé Bayrou : « on ne gouverne pas un parti comme une secte. »

Les « manœuvres » de l’Élysée

Depuis qu’il se veut le leader de la troisième voie, François Bayrou a souvent joué sur le registre de l’homme à abattre, et les commentateurs évoqué une volonté de Nicolas Sarkozy de le « flinguer » – politiquement s’entend. Le 10 avril, la reproduction d’une note interne de l’Élysée dans laquelle Dominique Paillé, conseiller du président, rapporte à ce dernier les récents déboires du MoDem, et se félicite des mouvements qui agitent le centre, a évidemment été présentée comme la preuve que Nicolas Sarkozy complote contre le candidat malheureux à la mairie de Pau. Lundi 14, à la conférence de presse, chacun guettait le couplet de Bayrou sur le complot pour l’abattre, mais le président du MoDem n’a pas fait dans la déclaration fracassante. Dénonçant « des manœuvres » de l’Elysée, il a déclaré vouloir s’engager « personnellement », et lancer une clarification au sein du MoDem, dans laquelle les militants trancheraient.

l’UDF ressuscité ?

La question va notamment porter sur le statut de l’UDF, que d’aucuns déçus du MoDem entendent faire renaitre de ses cendres. L’idée était d’ailleurs rapportée dans la note attribuée à M. Paillé, et est soutenue par le frondeur Arthuis. En plus de diviser un peu plus le centre, cette possible renaissance de l’UDF menacerait considérablement le MoDem sur le plan financier. Qui en effet gardera le siège, et l’argent de l’ancien parti ?

1 point pour Bayrou

Mercredi 16, les partisans d’une reformation de l’UDF ont été mis en minorité dans un vote du bureau politique de l’ancien parti centriste, qui a refusé tout retour à un UDF historique. Bayrou a donc marqué un point, mais a provoqué une nouvelle sortie de Jean Arthuis, qui a dénoncé une « pratique de gouvernance inacceptable » du président du MoDem.

Complot ou constat ?

Si l’Élysée manœuvre, Bayrou semble en tout cas avoir manqué son créneau. Il disait vouloir révolutionner la politique en apportant avec le MoDem une alternative au bipartisme PS – UMP, seulement depuis sa création, personne au MoDem ne semble pouvoir expliquer quelle sera cette alternative.
En dépit d’un bon score aux présidentielles, Bayrou n’est pas parvenu à convaincre lors des élections législatives et municipales. Et la critique, souvent formulée à l’égard du PS, qu’il ne se positionne que dans la critique de la majorité sans jamais être une force de proposition pourrait aisément être appliquée au MoDem, dont Bayrou crie l’indépendance sans qu’une ligne politique ou un programme aient pu être définis au bout de près d’un an d’existence. Avec les défections qui s’enchainent, les mouvements au centre et la défaite aux municipales qui l’a gravement affaibli, François Bayrou semble vouloir se convaincre lui même lorsqu’il affirme être sur le chemin d’une rénovation profonde de la politique française, et être la troisième force politique du pays. A relire la note interne de l’Élysée, on a le sentiment qu’il s’agit moins d’une volonté d’abattre François Bayrou que du constat de son échec. Mais les errements du MoDem ne doivent pas laisser penser que François Bayrou a dit son dernier mot. Les difficiles mois à venir n’entameront pas nécessairement sa capacité à rebondir.

Joseph Hirsch

Caméraman : Morgann Martin

Montage : Smaïn Belhadj