C’est dans le choc, dans la tristesse et la passion que les Français ont appris jeudi matin le décès de Chantal Sébire. Atteinte d’une maladie douloureuse, incurable et irréversible qui lui défigurait le visage, elle avait demandé à la justice d’être aidée afin de mourir dans la dignité. En vain.

Le parquet de Dijon a demandé ce jeudi l’autopsie du corps de Chantal Sébire, pourtant jugée « scandaleuse » par son avocat.
Le tribunal de grande instance avait estimé que la loi Léonetti, qui autorise le « droit au laisser mourir », n’était pas applicable au cas de Chantal Sébire. Pour l’auteur de la loi, qui s’est exprimé jeudi matin dans « le Parisien » : « elle n’avait pas demandé à la loi de s’appliquer. Son choix était une demande de suicide. »

Jeudi matin, les réactions se sont succédées dans les médias, souvent empreintes de la colère de n’avoir pas vu le souhait de Chantal Sébire réalisé.

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dessins : Emilie Sandoval

« Je me sens bouleversée. Au téléphone, elle me disait qu’elle n’en pouvait plus, qu’elle ne pouvait plus attendre. Elle n’avait même plus la force d’aller en Suisse.[Où l’euthanasie est autorisée, ndlr] Elle a dû partir toute seule en cachette. Je trouve ça vraiment moche. C’est le gouvernement qui n’a pas su écouter. » s’indigne Marie Humbert, marraine de l’association « Faut qu’on s’active ».
Pour Jean-Luc Romero, le très actif président de « l’association pour le droit de mourir dans la dignité », désormais présente sur Facebook, « Nous ne l’avons pas aidée. Je trouve dramatique qu’il faille que des personnes comme Marie Humbert pour son fils, Maïa Simon et Chantal Sébire doivent prendre la parole pour faire bouger les politiques. Tout le monde sait qu’en France, il y a entre 10.000 et 15.000 euthanasies clandestines pour mettre fin à des vies terribles »
Mme Christine Boutin avait la semaine dernière scandalisé les Français en déclarant « Chantal Sébire est difforme mais la dignité d’une personne va au-delà de l’esthétique de cette personne ». Elle a désormais elle aussi rejoint le concert des émotions : « la souffrance n’est pas un but en soi et la demande de calmer la souffrance est une demande légitime ».

Aller plus loin

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Selon Luc Chatel, le porte-parole du gouvernement, « la loi Léonetti permet de traiter 90 à 99% des cas ». Mais il est évident que le cas de Chantal Sébire, bien qu’exceptionnel, pose la question d’aller plus loin, au-delà de ce que permet la loi actuelle. C’est ce qu’avait déclaré Bernard Kouchner mercredi, avant que ne s’éteigne Chantal Sébire : « Il faut lui permettre de ne pas avoir besoin de se suicider dans une espèce de clandestinité dont tout le monde souffrirait, surtout ses proches. Il faut faire « une exception à la loi » qui l’empêche d’accéder à l’euthanasie. Ce serait humain, nécessaire ».
Nadine Morano, tout juste entrée dans ses fonctions de secrétaire d’état à la famille, estime quant à elle que « Le débat est mûr, mais c’est un sujet grave, difficile, qui ne doit pas être pas traité dans le cadre d’une émotion forte, comme celui de Madame Sébire .»
Que ce soit sous le coup de la passion ou avec plus de recul, légiférer pour prendre en compte ces cas particuliers et extrêmement douloureux semble indispensable aujourd’hui.

Plusieurs pistes sont envisagées, comme la création d’une haute autorité morale autorisée à statuer sur les « exceptions » que la loi Léonetti ne prends pas en compte. François Fillon a dors et déjà demandé à Léonetti une « évaluation » de sa loi. Le Président de la République pourtant friand des grandes causes émotionnelles, n’a pas encore quant à lui voulu s’immiscer dans le débat.

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