Le Collectif Télé, créé pour le respect de la Convention Collective des salariés intermittents télé, appelle tous les réalisateurs et techniciens télé à boycotter la société Sacha Production (« Question Maison »), jusqu’à ce qu’elle respecte ladite Convention.

Intermittents télé, pour S’inscrire au Collectif Télé.

Le statut d’intermittent du spectacle est depuis de nombreuses années révisé et modifié, car renégocié au sein de l’Unedic par les différents partenaires sociaux, au point que les intermittents eux-mêmes ne savent jamais vraiment ce qu’il en est réellement de leurs droits et de leurs devoirs.

Les « intermittents télé » (tous les techniciens et réalisateurs qui travaillent à la fabrication des programmes télé), ont longtemps eu des conditions plus avantageuses (de meilleurs salaires et par voie de conséquence une plus forte indemnisation) que les intermittents du théâtre ou du spectacle vivant par exemple. Mais depuis la réforme de juin 2003, leurs conditions de travail et d’indemnisation se sont pour eux aussi nettement dégradées : baisse du nombre de mois (de 12 à 10) pour réaliser ses heures, baisse (30% en moyenne) de l’indemnisation chômage, suppression des indemnités les week-end, baisse des salaires justifiée par la production de programmes « cheap » (pour des chaînes du câble et satellite, croissantes), etc.

A ces conditions toujours plus difficiles pour les intermittents télé, s’est ajouté un problème nouveau en fèvrier 2007. La société de production Reservoir Production a décidé unilatéralement, du jour au lendemain, de déclasser tous ses salariés intermittents (dont certains travaillant très régulièrement sur leurs programmes depuis de très nombreuses années), d’un statut de cadre à non-cadre, et de les rétrograder dans le même temps à un poste inférieur, entraînant par là-même une baisse de leurs rémunérations. Ainsi les Chef-opérateurs image se sont-ils retrouvés Opérateurs image, les Chefs-op son Opérateurs son, ou encore les Chefs monteurs simples Monteurs, pour un travail identique mais pour des salaires moindres que ceux payés le mois précédent!

Devant cette situation inacceptable, ces intermittents se sont très vite organisés en collectif et ont été rejoints par plusieurs centaines de techniciens et réalisateurs (Aujourd’hui plus de 700 ) d’autres secteurs et d’autres productions. Renseignements pris, ce collectif a découvert qu’il avait été votée en décembre 2006 une Convention Collective de la Production Audiovisuelle, signée entre autres par le SPECT, syndicat représentant les plus grosses sociétés de production audiovisuelle). Aucune Convention Collective n’avait été prévue jusque là pour régir les métiers de la production du flux (Documentaires, magazines, reportages, etc.).

Sont concernés par cette Convention tous les producteurs audiovisuels prenant l’initiative et la responsabilité de la réalisation de programme composé d’images et de sons animés, ayant pour destination principale leur diffusion sur les antennes des services de communication audiovisuelle de télévision. Cette Convention Collective de la Production Audiovisuelle est applicable depuis août 2007. Elle a été étendue par décret paru au JO du 1er août 2007. L’article XIII.1 prévoit qu’elle s’applique aux contrats signés postérieurement au premier jour du 3ème mois suivant la date de publication au JO, soit le 1er novembre 2007. Pour les productions en cours au moment de l’extension, les conditions deproduction antérieures ont été maintenues jusqu’à la fin de la saison de production, dans la limite de 6 mois après l’arrêté d’extension, autrement dit le 1er février 2008. Pour toutes les sociétés de production, l’application de la convention est donc obligatoire depuis le 1er février 2008.

L’intention de la direction de Reservoir Prod était donc de déclasser ses salariés (De cadre à non-cadre pour se mettre en conformité avec cette Convention, sans que cela ne lui coûte plus cher pour autant, voire un peu moins… Une action de boycott a été menée début janvier, très efficacement, et très vite la direction de Reservoir Prod a dû céder pour ne pas mettre en péril ses productions, en particulier ses émissions quotidiennes. Pour préserver son image, vis-à-vis du grand public Reservoir Prod a prétexté un bug informatique, responsable de ces déclassements, mais dont personne du métier n’a bien sûr été dupe… (Voir Le JDD « Delarue face à une fronde des intermittents »).

Malgré cette action, seules quelques très rares sociétés de production appliquent aujourd’hui cette Convention, tant sur le montant des salaires que sur le paiement des heure supplémentaires ou celui des jours majorés, ainsi que sur les statut et qualifications de postes correspondant aux métiers réellement exercés. Pour toutes les autres sociétés, qui en ne respectant pas cette convention se mettent de facto hors-la-loi, il s’agit donc de négociations de gré à gré avec les salariés, sans obligation véritable si ce n’est celle du respect du SMIC! Ainsi les écarts de salaires peuvent être du simple au triple, pour un même travail. Parfois même pour une même émission produite par deux sociétés de production différentes!

Il est également important de rappeler qu’ avant l’avènement de cette convention, existait un accord de salaires dans la production audiovisuelle (étendu lui aussi) depuis avril 2000 ! Cet accord était revu à la hausse chaque année et était applicable obligatoirement par toutes les sociétés de production… Accord jamais appliqué, au déni de la loi !… Pour son chapitre sur les salaires, l’actuelle Convention Collective de la Production Audiovisuelle n’a fait que reprendre cet accord d’Avril 2000. La grille des salaires était donc d’application obligatoire depuis 2000 ! Autrement dit, les sociétés de production ont sous-payés pendant 8 ans leurs salariés intermittents… en toute illégalité!

Le Collectif Télé, représenté par l’avocate Me Davideau, tente donc d’imposer le respect de cette Convention Collective à l’ensemble des sociétés de prod. D’abord par des informations et des explications données à tous les techniciens et réalisateurs concernés, via Son Site. Et en organisant ensuite de nouvelles actions de boycott contre les plus grosses -et les plus grasses!- sociétés de production télé, ou encore contre celles dont les méthodes sont jugées brutales et inacceptables par les salariés intermittents. Ainsi le Collectif Télé appelle-t-il aujourd’hui tous les intermittents télé à boycotter la société de production Sacha Prod, car 35 réalisateurs et techniciens travaillant tous pour l’émission « Questions Maison » sont menacés de renvoi, du jour au lendemain (par définition un intermittent est exposé au boycott de n’importe quelle prod, sans préavis), simplement parce qu’ils réclamaient leur dû, c’est-à-dire le respect de la Convention Collective, dont ils étaient très loin, à tous points de vue!

Le Collectif Télé, qui a informé et/ou interpellé les principales sociétés de production télé, en leur adressant des courriers, attend aujourd’hui des retours de celles-ci et, selon l’attitude des unes ou des autres, envisage d’ores et déjà de nouvelles actions ciblées…

HM pour LTL

PS: Peut-être certains verront-ils là une contradiction de LaTéléLibre, média télé construit sur la gratuité et le bénévolat, à défendre et promouvoir des revendications salariales dans un secteur qui est -un peu- le sien! Le statut d’intermittents du spectacle a toujours été une aide indirecte à la création culturelle de notre beau pays en permettant à de nombreuses créations alternatives de voir le jour (court-métrages, spectacles, pièce de théâtre, documentaire, musique… TéléLibre!, etc.) Et c’est en grande partie parce que des réalisateurs et techniciens, salariés ailleurs, sont bénévoles à LaTéléLibre, que ce média peut encore exister aujourd’hui…