Ce 13 février 2008, la grève des professionnels de l’audiovisuel public est d’emblée un évènement historique, il s’agit…

Ce 13 février 2008, la grève des professionnels de l’audiovisuel public est d’emblée un évènement historique, il s’agit de la première grève de l’ensemble des personnels depuis 74, éclatement de l’ORTF.

Le matin, Daniel Bilalian lui-même indique à l’AFP faire grève « par attachement » pour son entreprise :
Et puis, fait rarissime, les salariés sont dans la rue, environs 3000 d’entre eux, avenue Montaigne, en direction de l’Elysée, mais ils seront vite bloqués. Bilallian, un temps annoncé, n’est finalement pas là, mai les responsables d’unités de programmes sont bien présents et battent le pavé. Ce n’est pas qu’ils ont peur pour leur boulot, nous disent-ils, et ce n’est pas une manifestation corporatiste : ils sont très inquiets, voire remontés, c’est tout, et veulent des garanties solides. Parce que pour eux, le service public de la radio et de la télé est, tout simplement, en danger.
Il faut dire que, le 8 janvier 2008, l’annonce surprise de la suppression de la publicité dans l’audiovisuel public dès janvier 2009, par le Président de la République, lors de sa désormais fameuse conférence de presse de rentrée, a provoqué comme un séisme. France Télévisions (2, 3, 4, 5, rfo) libérée du marché et de la loi cruelle de l’audimat… superbe idée, non ? Peut-être une chance historique ? Une « grande révolution culturelle » pour notre pays ? Pour les grévistes, le problème est que, du coup, l’évasion des annonceurs et partenaires a dès lors déjà commencé… Et que sans pub, France Télévisions perd une entrée d’argent de l’ordre de 800 millions d’euros, plus les 400 millions qui seront en conséquence nécessaires à la production des 3 heures d’antennes libérées par la disparition des spots…
L’intersyndicale a été reçue la veille, à l’Elysée, par les conseillers du Président, et a reçu des garanties : euro pour euro, le manque à gagner sera comblé. Mais pour les porte-paroles des 8 syndicats unis comme jamais : rien n’est décidé encore sur les pistes de financement. Et là naît l’inquiétude….
Qui va payer ?
Pour la société des journalistes de France 2 « ce qui était prévisible depuis des mois devient clair aujourd’hui. Nous voulions plus de moyens, plus de recettes publicitaires pour financer nos efforts (…) Nous n’avons finalement droit qu’à la disparition pure et simple d’une grande partie de notre financement. Rayée d’un trait de plume ». D’autres questions, au delà des questions budgétaires, se profilent et préoccupent les salariés : quel avenir pour le service public ? Quels cahiers des charges, quelle qualité des programmes ? Quelles garanties concernant le pluralisme, et l’indépendance des chaînes ? L’inquiétude, après, se nourrit de la méfiance – parce qu’il y a eu ces rumeurs de démantèlement des régionales de France 3, démenties entre temps, ou ces débats sur la question de savoir s’il n’y avait pas trop de chaînes à France Télévisions…
Devant le mur de CRS qui bloque les manifestants au bout de l’avenue Montaigne, ils reçoivent l’invitation à être reçus à l’Elysée par Mme Albanel, ministre de la culture. Refus, c’est par Nicolas Sarkozy qu’ils demandent à être entendus.

Karine Yaniv
Image: Henry Marquis, montage: Mylène A.