Dans un face-à-face organisé par le magazine Philosophie Magazine (numéro huit) entre Nicolas Sarkozy et Michel Onfray, le candidat de l’UMP adopte des positions qui, depuis leur publication il y a deux semaines, font beaucoup de bruit : il se révèle partisan du déterminisme génétique. Voici sa réplique qui fait scandale :

onfray sarkozy

« J’inclinerais, pour ma part, à penser qu’on naît pédophile, et c’est d’ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie. Il y a 1200 ou 1300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n’est pas parce que leurs parents s’en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable. Prenez les fumeurs : certains développent un cancer, d’autres non. Les premiers ont une faiblesse physiologique héréditaire. Les circonstances ne font pas tout, la part de l’inné est immense. »

Une première réponse a été faite dans le journal Marianne daté du 31 mars par le généticien Axel Kahn, qui considère que l’ancien ministre va à l’encontre des dernières données scientifiques et fait montre d’un déterminisme dangereux qui rappelle les théories de la Nouvelle Droite http://recherche-en-danger.apinc.org/spip.php?article1564

De son côté, Ségolène Royal, s’est exprimée vendredi : « Si moi je m’étais permise de dire des énormités pareilles, je pense que cela aurait émergé dans le débat public », demandant l’intervention des scientifiques dans ce débat.

Jean-Marie Le Pen, qui a dénoncé vendredi à Argenteuil ceux qui veulent « karcheriser » la banlieue s’est exprimé le 2 avril dernier dernier à ce sujet : « Si nous sommes habités par des gènes qui sont en eux-mêmes criminogènes, ça veut dire que nous n’avons pas la responsabilité de ce que nous faisons. Il a dû se tromper, ce n’est pas possible. »

François Bayrou, en déplacement en Corse, a déclaré que « c’est un propos très grave, ça voudrait dire qu’on n’a aucune chance, que son destin est joué à l’avance. Je ne crois pas qu’il y ait un médecin, un psychiatre en France qui puisse entendre ces propos sans frémir. »

On peut être surpris du retard avec lequel ces propos ont été commentés, cela fait plus d’un mois que le numéro de Philosophie magazine est paru. Cependant, Nicolas Sarkozy a tenu à réagir alors qu’il était en déplacement à Saint-Rémy-de-Provence, dans les Bouches-du-Rhône, ne souhaitant pas polémiquer, relevant la nervosité de ses adversaires : « Il faut que chacun garde son calme et se consacre à ses projets. Ce n’est pas en attaquant les autres que l’on progresse dans les sondages. »

L’archevêque de Paris, Mgr André Vingt-Trois, s’est opposé lui aussi ce week-end à cette conception : « Surtout, ce que me paraît plus grave, c’est l’idée qu’on ne peut pas changer le cours du destin. C’est vrai quand on prend la perspective génétique, mais c’est aussi vrai quand on prend la perspective sociologique » a-t-il dit. « Parce que dire que quelqu’un est pré-déterminé par la famille qui l’a entouré, par les conditions dans lesquelles il a vécu, ça veut dire que l’homme est conditionné absolument. »

Qui aurait pensé que le débat philosophique et scientifique de l’inné et de l’acquis interviendrait pendant cette campagne ?

Nicolas Condom